Copa America  : claps de fin, par Simon Lebris

Copa America  : claps de fin, par Simon Lebris
Le Brésil a beau compter plus d’un demi-million de morts dues à la pandémie (et à l’impéritie de son gouvernement), il s’est empressé d’organiser une compétition initialement prévue en 2020 en Argentine et en Colombie, puis en Argentine seulement, et enfin au Brésil  : il l’avait toujours emportée quand il l’organisait chez lui.

Bolsonaro s’en réjouissait, il avait même pronostiqué une victoire de la seleção de Tite par 5 buts à 0. Mal lui en a pris puisque l’Argentine l’a emporté grâce à un lob astucieux de Di Maria consécutif à une longue passe du milieu De Paul et à une erreur du défenseur brésilien de l’Altletico de Madrid, Renan Lodi. On ne peut pas dire que ce but fut inscrit contre le cours du jeu car de jeu, il n’y en avait quasiment pas. Pour paraphraser Marx (Groucho), on pourrait écrire  : «  On a assisté à un bon match, mais ce n’était pas celui-ci  !  » Pour les extraits qu’on a pu voir de cette Copa America qui n’a guère intéressé une France désabusée par son élimination de l’Euro, il y avait pourtant matière à espérer avec un Brésil ayant marqué une dizaine de buts dans ses quatre matchs de poule, l’Argentine ne se contentant de scorer que contre l’Equateur (3-0) en quarts. Les partenaires de Thiago Silva ont eu le contrôle de la rencontre, mais faute de créativité, ils n’ont guère inquiété l’immense et talentueux gardien argentin Emiliano Martinez. Les entrées dès la seconde mi-temps de Firmino, puis de Vinicius Jr, Emerson et de l’attaquant de Flamengo Gabriel Barbosa, surnommé “Gagbigol”, n’y changèrent rien. La domination brésilienne se heurtait à la défense rugueuse des Argentins (âmes sensibles, passez votre chemin), négligeait les montées latérales et s’en remettait à Neymar pour trouver la faille, soit par un dribble époustouflant, soit par une passe inattendue. Mais souvent cerné de deux ou trois défenseurs déterminés, le meneur de jeu auriverde en sortait rarement vainqueur. Il s’en est fallu même d’un cheveu que Messi ne porte le coup de grâce, un cheveu ou plutôt les doigts d’Ederson qui lui subtilisèrent la balle dans les pieds, évitant ainsi un 2-0 qui eût tué tout suspense, à vrai dire seul intérêt de cette finale.
Vient maintenant le temps des bilans et des conclusions, s’il est possible d’en tirer. Amorcé depuis des décennies, le transfuge des meilleurs jeunes joueurs sud-américains en Europe n’a fait qu’aggraver la dénaturation de leurs spécificités. Parfois quelques gestes inattendus, quelques feintes inédites nous font espérer que tout n’est pas perdu mais les tactiques et les enjeux sont si considérables qu’ils nous obligent à nous satisfaire de ces bribes de miettes. Avec sa victoire, l’Argentine a mis fin à la disette de succès en sélection de Messi, élu meilleur joueur du tournoi. Elle a mis fin également à la série de victoires auxquelles s’était habitué le Brésil chaque fois que cette compétition se déroulait sur son immense territoire. Mais s’il faut retenir une image de cette rencontre, la seule peut-être chargée d’émotion, c’est celle de Messi et Neymar, ex-partenaires au Barça mais toujours frères dans l’amour du jeu, s’étreignant longuement après le coup de sifflet final  : on peut même rêver, utopistes que nous sommes, que le Ney consolait la Pulga de sa tristesse que Neymar n’ait pas gagné  !